Nous devrions peut-être nous engager dans la moindre marche avec un esprit d’éternelle aventure sans retour – prêts à renvoyer nos cœurs embaumés comme des reliques vers nos royaumes affligés.

Henry David Thoreau

Dans leurs images

Cécile Dutheil de la Rochère

À la folie est le fruit d’une enquête menée par l’écrivaine Joy Sorman. Pendant un an, une fois par semaine, elle a suivi la vie d’un pavillon psychiatrique, avant de relater par écrit ce qui l’avait marquée : la personnalité des soignés et des soignants, et les protocoles mis en œuvre par ces derniers. Il en résulte un travail bien fait et raisonné que le lecteur pourra compléter par un recueil de textes écrits par des « fous » et découverts à la bibliothèque de Sainte-Anne : la lecture de ces Textes sans sépulture est stupéfiante car elle bouleverse toutes nos catégories de pensée, ou presque.

[…] À ceux qui croient à la vertu de la littérature plus qu’à celle de l’enquête, on recommande de lire les Textes sans sépulture recueillis par Laurent Danon-Boileau, psychanalyste et professeur de linguistique – son introduction est un modèle de justesse et de grâce. Le volume est mince, il rassemble une série de textes très courts, de tous genres, écrits entre 1850 et 1930 par des personnes internées à Sainte-Anne. Il s’agit d’une réédition – le livre a paru une première fois en 1980 – mais elle valait la peine.

Cette fois-ci, l’expérience n’a rien d’une immersion dans le réel, ou alors dans un réel d’un autre type, plus impalpable, infiniment troublant, proche de ce continent de pays appelés Poésie, Art, Imaginaire. Les écrits se succèdent, sans titre, sans nom ni signature, sans aucun appareil. Ils sont sans sépulture en effet, nus, prêts à errer comme les âmes en peine qui nous les ont offerts.

Ils malmènent toutes les frontières, tous les paradigmes que nous avons en tête quand nous lisons. Un auteur ? Garant de quoi ? Au nom de qui ? Et quel genre ? Poésie, prose, expression de soi libre et sans contraintes ? Il faut les lire parce qu’ils sont hallucinants au sens propre. Souvent ils sont d’une grande beauté. Plus souvent encore ils sont désarmants. Étranges, hantés, souffrants, pleins de termes inexistants ou déformés. […]

Lire ici l’intégralité de l’article sur En attendant Nadeau.

Textes sans sépulture

Entre les écrits du délire, témoignages de la souffrance et de l’épouvante, et les égarements passagers des hommes raisonnables, on aimerait que subsiste une frontière.  Ces

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