Nous devrions peut-être nous engager dans la moindre marche avec un esprit d’éternelle aventure sans retour – prêts à renvoyer nos cœurs embaumés comme des reliques vers nos royaumes affligés.

Henry David Thoreau

Oiseau, l’œil écoute, par Joséphine Michel, photographe

Fabien Ribery

Victimes de l’anthropocène, les oiseaux disparaissent.

Ils meurent, mais ils sont là, un peu partout dans l’édition photographique contemporaine (chez Francesca Todde, chez Julien Magre, chez Aurélie Scouarnec, aux éditions Atelier EXB dans une superbe collection dédiée) et les travaux d’artistes (Gilles Aillaud à Beaubourg et à la galerie de la Librairie Métamorphoses, à Paris ; Vera Muratet ; au château de Flamanville dans le Cotentin).

Avec Syrinx, publié par les éditions Fario, Joséphine Michel compose à son tour un hymne à la gent ailée.

Sur papier épais ou glacé – une invitation à la caresse -, Syrinx approche l’héraldique des oiseaux, leur stupéfiante beauté, et l’organisation supérieure de leur plumage.

Dieu, pensait Newton après Platon, s’exprime en langage mathématique.

Il n’y a pas dichotomie entre la sensibilité et la géométrie, mais une même musique des sphères.

On ne sait d’abord pas où l’on est, ni dans quel espace technique – une photographie ? une gravure ? un dessin ? -, avant que de comprendre que notre regard se situera du côté du mystère de la vie et des formes.

La désorientation participe de la lecture, comme si nous étions nous-mêmes emportés dans les airs par un oiseau tourbillonnant.

Joséphine Michel fixe des vertiges, des couleurs, des structures supérieures propres à telle ou telle espèce.

A la limite de l’abstraction, ses photographies célèbrent la matière comme esprit, et les roches desquelles s’élancent les volatiles comme des royaumes secrets.

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Syrinx

Écouter/voir : la culture occidentale a depuis longtemps isolé sinon opposé ces deux champs de notre vie perceptive : là où l’œil objective, met à distance le monde afin de le soumettre aux rigueurs de la raison, l’oreille immerge le sujet dans ce même monde et au besoin conduit à son envoûtement. Alors que la vue dispose du temps, l’écoute doit se saisir de l’instant dans lequel ce qui lui est dû surgit pour disparaître. Nous aurions tort de croire cette typologie inébranlable. Ce que l’on peut appréhender de l’ouïe des oiseaux bouleverse la rigidité d’un tel modèle : leur usage de l’écoute semble allier une

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