ÉTÉ 2017 :
Quatre livres, chacun sous étui, réunis sous bandeau.
1
Avec ses Chansons madécasses (c’est-à-dire malgaches), le chevalier Évariste des Forges de Parny inventait à la veille de la Révolution un genre littéraire que plus tard le Gaspard de la Nuit d’Aloysius Bertrand, puis Baudelaire consacreraient : le poème en prose. Anticolonialiste avant la lettre, ce recueil absolument moderne allie une envoûtante sensualité à une musicalité naturelle qui inspira trois mélodies admirables à Maurice Ravel. Sous couvert d’avoir été « traduit en français », il fleurit loin de toute convention poétique d’époque. Repris en anthologies et de loin en loin réédité, cet ensemble n’avait à ce jour jamais paru sans illustrations ni présentation d’aucune sorte.
2
Offerts en écho aux chansons « recueillies » par Parny, ces poèmes en prose de Jacques-Joseph Rabearivelo, le premier et le plus grand poète malgache d’expression française, puisent aux sources même des traditions des Hauts-Plateaux de l’île : l’Imerina. Qu’ils soient originaux ou empruntés au fonds ancien des hain teny (genre qu’étudia, comme on sait, Jean Paulhan), ces brefs discours ou proverbes dialogués, au sens énigmatique, au symbolisme déconcertant, tout ensemble raffinés et empreints d’une fraîcheur bien dans l’esprit et la manière de sentir « madécasse », disent le mal d’amour, célèbrent les plaisirs et les jours, lamentent la mort. Nous en donnons ici la première édition séparée et non préfacée.
3
Si Paulhan s’intéressa aux hain teny malgaches, la forme poétique du pantoum malais inspira, quant à elle, plusieurs poètes français du XIXe siècle, de Hugo à Banville, en passant par Gautier et Leconte de Lisle. Un temps disciple de Mallarmé, tenant d’une poésie « scientifique », René Ghil signe avec le Pantoun des Pantoun (1902), en marge de son œuvre, un vaste poème lyrique inspiré par une rencontre qu’il fit à l’Exposition universelle de 1900 avec une jeune danseuse javanaise. Mêlés à une langue française étrangement rudoyée selon les principes de ce que Ghil nommait l’« instrumentation verbale », de très nombreux mots javanais tissent ici une exotique célébration de l’amour de loin cher aux anciens troubadours.
4
Fabian Avenarius Loyd, dit Arthur Cravan, mourut légendaire vers 1918 (?), porté disparu dans le golfe du Mexique. Il colporta avant-guerre à Paris, pour la modique somme de quelques centimes la pièce, une revue dont il fut l’unique auteur : Maintenant. Boxeur défait en 1916 à Barcelone par le champion noir américain Jack Johnson, poète scandaleux passé maître en provocations, ses poèmes, « prosopoèmes », notes et autres fragments extraits de Maintenant et d’une édition posthume sont offerts ici pour constituer un recueil, poétique opera omnia du pachyderme lyrique, ses manuscrits ayant été détruits ou demeurant à ce jour introuvables. André Breton a pu dire justement que longtemps les poètes reviendraient boire à lui comme à une source.