En marge d’une œuvre pensée et architecturée, de tableaux finis, prêts pour l’exposition, dotés d’un titre, comme parfois au sein même de la toile fameuse d’un maître, se trouvent parfois des fragments d’une autre eau, d’une autre trempe, d’une autre main. C’est ce qu’observe ici James Sacré avec une si sensible attention dans les dessins qui sinuent aux côtés de l’œuvre peinte reconnue, cataloguée, de Jacques Clauzel. Et quelle serait alors la force ou la vertu de ces dessins tenus plus ou moins au secret : intime désir qui suit sa voie sans remord, matrice inavouable venant révéler la trame de l’œuvre exposée ?
Et le poète de se demander s’il n’aurait pas lui aussi une main seconde, une façon de faire avec les mots qui n’aurait pas cet apprêt que l’on donne, nolens volens, aux textes destinés à l’édition.
Cette « guenille » de phrases encore informes, immédiates, ressemblant à des premiers poèmes qui perceraient sous le savoir faire, s’il ne la trouve pas à l’état séparé, comme le sont les dessins de Clauzel, James Sacré en a soudain trouvé la trace dans les paroles d’une « ritournelle anodine » de Robert Duncan entendue autrefois et qui est là, chantée depuis toujours et dans chacun de ses poèmes.
Difficile d’imaginer ce qui serait l’équivalent de ces dessins
J.S.
En marge de mes livres : je ne sais pas dessiner.
Les photos que je prends sont vraiment trop peu
Soucieuses de formes et de couleurs. En fait
Je n’ai rien à montrer
Que j’aurais longtemps gardé par-devers moi. Ou bien
Quelque chose est resté dans le non-dit,
Vécu mal rêvé, motifs de langage qu’on n’a pas osés ?
En somme tous mes silences. Je les entends mal
Tant que rien d’écrit. Ecrire sans doute
Les montre en plein ; mais je ne vois rien.
Cette édition originale comporte trente exemplaires numérotés de I à XXX, signés par l’artiste et par l’auteur, accompagnés d’un dessin original de Jacques Clauzel, sous étui cartonné avec intervention de l’artiste.
Prix : 190 €.