Henri Droguet est né à Cherbourg en 1944 ; il habite à Saint-Malo depuis 1972 et y a enseigné les lettres jusqu’en 2004.
» Pour tout vous dire (ou presque)
Voilà. J’habite par 48°39′ de latitude Nord et 2°01′ de longitude Ouest. J’y prends le vent (secteur dominant nord-quart-nord-ouest) dans tous les sens ; j’y prends la mer (quelquefois); je prends mon temps ; des mots me prennent par surprise. Je n’écris pas de poésie figurative. C’est Pierre SOULAGES qui a dit : « Je ne représente pas, je présente ». Eh bien voilà, je ne figure pas, je défigure et c’est du tohu-bohu élémentaire et verbal que je mets en espace, en musique, en crise, en désordre, que je bricole avec ma caisse à outils rhétoriques et intertextuels. Je connais la manoeuvre mais je me soucie peu d’acrobaties, d’installations, de dispositifs, de performances formalistes post-modernes ou post-post-modernes… Je règle des comptes avec d’obsolètes soudards et dieux à ferrailles, toges ou barbichettes, avec moi-moi-moi (par hygiène). J’ajoute des paquets d’oiseaux et de mer, un ébouriffé foutoir botanique, du bleu, beaucoup de bleu. Il y a dans certains coins, dans les ombres de cet état de choses (pourquoi ne pas le dire?), le formidablement discret sourire, le désordre limpide et déchirant de Dieu. Ce sont les viscères ou l’écume du monde et de la réalité dans leur tout, leur moins que tout, leur presque plus que tout.
Il n’y a qu’un piéton anonyme, une figure nomade et bancroche en marche dans les nuits dévorées dévorantes, sous les mansardes hirsutes chevelues des cieux en bataille ; la mer bossue s’affuble et se démène ; une étoile fume ; les pluies picotent un lièvre, des schistes, un deltaplane ; la forêt sent le bétail bleu et le poumon froid. Le passant pisse aux lisières, il bée dans la rature des choses ; les vents bourrus effacent ses traces provisoires ; éberlué il dégoise et dégobille ses rengaines, ses palimpsestes, ses psaumes sans trémolos lacrymogènes ou pathétique (il ne regarde pas lyriquement son nombril); il court plus loin, il baguenaude, il passe outre, droit devant, droit devant…
Tout ça s’écrit à la va comme je te pousse, et c’est l’aubaine et c’est l’absence. Il y a heureusement ce que j’oublie et ce que j’ignore. Cherchez bien, ça vous trouvera. »
Il a publié :
Le bonheur noir, Mercure de France, 1972, épuisé
Chant rapace, Cahier de Poésie 3, Gallimard, 1980
Le contredit, Gallimard, 1982, épuisé
Ventôses, Champ Vallon, 1990
Le passé décomposé, Gallimard, 1994
Noir sur blanc, Gallimard, 1998
La main au feu, Gallimard, 2001
48°39’N‑2°01’W (et autres lieux), Gallimard, 2003
Avis de passage, Gallimard, 2005
Albert & Cie, histoire, Apogée, 2005
Presto con fuoco, Mona Kerloff, 2006
Off, Gallimard, 2007
Boucans, éditions Wigwam, 2010
Avis de grand frais, Contre-allées, 2011
Maintenant ou jamais, Belin, 2013
Clatters (bil.), Rain-Taxi, Minneapolis USA 2014
Là-bas/ ci-gît/ suis, Approches, 2014
et quelques livres d’artiste :
Champ du signe, avec des gravures de Thierry Le Saëc, La Canopée, 2003
Pluies, vents, bords perdus, avec des lithos d’Eric Brault, Galerie Ombre et Lumière, 2003
Avis de passage, avec des gravures de Dominique Penloup, Le galet bleu, 2004
Brouhahas, avec une pointe sèche et un pastel de Thierry Le Saëc, La Canopée & Galerie Ombre et Lumière, 2006
Miroir obscur, avec des gravures de Dominique Penloup, Le galet bleu, 2009
Paix, chimères, anamorphoses, avec des sérigraphies rehaussées à l’acrylique et au crayon de couleur d’Yves Picquet, éditions double croche, 2009
Cantique de l’algue bleue, avec des détrempes d’Eric Brault, Ombre et Lumière, collection « Césure », 2010
Ceci n’est pas une fable, avec des collages et impression numérique de Thierry Le Saëc, La Canopée, 2011
& tout le tremblement, avec une peinture de Loïc Le Groumellec, éditions Fario, 2012
Rondes de nuit, avec des estampes et une peinture sur tissu d’Yves Picquet, éditions double croche, 2013
Il a collaboré et collabore aux revues suivantes :
Nouvelle Revue Française, Po&sie, L’animal, Rehauts, Théodore Balmoral, Fario, N4728, Diérèse, Europe, Hopala, Le Nouveau Recueil, La Revue de Belles Lettres, Décharge, Le préau des collines.…etc…
il a aussi produit des livres pauvres pour Daniel Leuwers avec Thierry Le Saëc, Dominique Penloup, Pierre Alechinsky, Loïc Le Groumellec, Yves Picquet, Eric Brault, Rodolphe Le Corre, etc..
Il est traduit en allemand, espagnol, bulgare, anglais (USA).